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La revanche du papier

La croissance phénoménale de Google et de Facebook ainsi que l'emprise qu'exercent ces empires sur notre capacité d'attention font en sorte que nous assistons à un véritable assaut concurrentiel contre les entreprises médiatiques traditionnelles. Un assaut qui, dans de nombreux cas, se transforme en débâcle.

De nombreux journaux et hebdomadaires ont fermé leurs portes ces dernières années, modifiant le paysage de l'information. La seule année 2017 a montré à quel point ce secteur est en mauvais état : fondé en 1854, le Oldham Evening ChronicleATTENTION - Ce lien ouvrira dans un nouvel onglet. a cessé ses activités, entraînant la fermeture définitive de ce journal et la perte d'une cinquantaine d'emplois. Le pure-player numérique GawkerATTENTION - Ce lien ouvrira dans un nouvel onglet. s'est placé sous la protection de la loi sur la faillite en raison d'une poursuite. Le Alaska Dispatch NewsATTENTION - Ce lien ouvrira dans un nouvel onglet. a fait de même, en dépit de la compétence et des ressources de sa nouvelle propriétaire. Fin novembre, Cumulus MediaATTENTION - Ce lien ouvrira dans un nouvel onglet., qui exploite 446 stations de radio dans 90 marchés et compte plus de 3 500 employés, a connu le même sort.

Le plus surprenant, c'est que les nouveaux médias numériques connaissent eux aussi des difficultés. Ainsi, on apprenait récemment que BuzzfeedATTENTION - Ce lien ouvrira dans un nouvel onglet., l'un des leaders du marché sur le Web, a raté de plus de 20 % sa cible de revenus, ce qui a amené l'entreprise à mettre de côté son projet de se lancer en Bourse. Même histoire chez Vice Media, dont les résultats devraient être annoncés bientôt, et pour la plateforme Mashable, dont le prix de venteATTENTION - Ce lien ouvrira dans un nouvel onglet. de 50 M$ US à Ziff Davis est bien en deçà de sa valorisation de 250 M$ qui avait cours lors de sa plus récente ronde d'investissement, en mars 2016.

Paradoxalement, ce sont les entreprises plus traditionnelles qui semblent paver la voie. Le prix de l'action du New York Times s'est apprécié de 50 % dans la dernière année : il a franchi la barre des 20 $ par action en octobre dernier et oscille depuis entre 17 et 19 $. La croissance des revenus numériquesATTENTION - Ce lien ouvrira dans un nouvel onglet. et l'augmentation du nombre d'abonnements placent le géant new-yorkais en bonne position. Au cours de la même période, News Corporation, l'entreprise menée par Rupert Murdoch, a progressé de 40 %, atteignant 16,54 $ US.

Plusieurs invoquent la présidence controversée de Donald Trump pour expliquer ce phénomène : augmentation de la popularité des médias d'information pour les uns, recrudescence de l'attrait des plateformes d'infodivertissement (infotainment) pour les autres.

Mais cela n'explique pas tout. Après des années d'exploration et d'expérimentation, est-il possible que les plateformes traditionnelles aient enfin percé le mystère du numérique et trouvé des façons de transformer cette menace en source de valeur durable? Ou encore, peut-on imaginer qu'après la frénésie des tablettes et du tout-à-l'écran, les consommateurs reviennent vers les valeurs sûres du journalisme traditionnel?

L'industrie des médias est fascinante à bien des égards. En dépit de l'effervescence qui place ses joueurs historiques en concurrence les uns avec les autres, il semble pourtant que ces médias traditionnels sont toujours dans la course. Et comme beaucoup d'entre eux sont cotés en Bourse, ils peuvent constituer des occasions intéressantes en matière d'investissement. C'est aussi de cette manière que se prend la revanche du papier.