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Prix Nobel et risques systématiques et spécifiques d’un titre

En décembre 2007, à l’âge de 70 ans, le généticien moléculaire Mario Ramberg Capecchi reçoit le prestigieux prix Nobel en physiologie ou médecine pour ses découvertes scientifiques. Les premières années de sa vie n’apparaissaient pourtant pas à ce point prometteuses...

Né en Italie en octobre 1937, Mario Ramberg Capecchi perdit son père lors de la deuxième guerre mondiale, alors que sa mère fut arrêtée et emprisonnée à Dachau, un camp de concentration allemand. Sans parents, Mario passa d’une famille d’accueil à la rue, survivant pendant de longues années en errant de ville en ville. En 1945, sa mère fût libérée et le retrouva malade, exténué et analphabète.

En 1946, mère et fils partirent pour les États-Unis où Mario fréquenta l’école primaire malgré son retard d’apprentissage académique et sa méconnaissance de l’anglais. Il poursuivit ses études et obtint finalement, en 1967, un doctorat en biophysique de l’Université de Harvard.

Cette histoire vraie est symbolique.

Généralement, un investisseur débutant n’a que peu de connaissances à propos du marché boursier. On pourrait donc dire qu’il est alors démuni, non pas physiquement, mais psychologiquement. Il est en quelques sortes « analphabète » en ce qui concerne l’environnement boursier. Petit à petit, avec peine et patience, il apprend les notions de base, non sans faire d’erreurs. Il surmonte cependant les difficultés avec application et persévérance en suivant des cours, en étudiant et en formulant des théories, pour finalement obtenir le succès espéré. C’est le travail excitant d’un chercheur.

Le but de cet article est d’ajouter un fragment à la connaissance de l’investisseur, à l’aider à atteindre son prix Nobel personnel, même si inconnu du monde. Ce succès est mérité puisque l’investisseur, au terme de son apprentissage, sait pratiquer le choix de ses investissements, analyser la rentabilité de son portefeuille, affiner les connaissances acquises et appliquer le bon sens. Il devient ainsi un chasseur de profit. Son plus grand apprentissage pourrait se résumer ainsi : que le marché n’est pas rationnellement prévisible et que c’est grâce à ses talents personnels et à sa préparation qu’il saura user de techniques pour faire quand même du profit.

Il y a deux types de risque que l’investisseur assume quand il achète un titre : le risque propre à la compagnie et le risque général du marché. Le premier s’appelle risque spécifique et le deuxième risque systématique. Du point de vue de l’investisseur, le risque spécifique est à mon avis plus dangereux que le risque systématique.

Voici des exemples de risque spécifique (SP):

  1. Annonce de bénéfices plus bas ou supérieurs aux prévisions.
  2. Changement dans le gout des consommateurs
  3. Poursuites judiciaires
  4. Grèves
  5. Obtention ou perte d’un contrat
  6. Erreurs de gestion
  7. Recommandations des analystes

Un exemple du risque 2 est la compagnie BlackBerry qui, à l’arrivée de l’iPhone de Apple, perdait rapidement le leadership dans le marché des téléphones dit « intelligents ».

Voici des exemples de risque systématique (SY):

  1. Mouvement général du marché
  2. Évolution de l’économie (récessions)
  3. Inflation
  4. Taux d’intérêt
  5. Changements de gouvernement (politique)

Un exemple du risque A est la dépendance du marché financier canadien du marché américain. Une évolution positive ou négative des indices américains favorise la même tendance dans les indices canadiens.

Les combinaisons plausibles créées par les deux types de risque sont les suivantes :

  1. Titre à la hausse forte : SY favorable + SP favorable
  2. Titre à la baisse forte : SY défavorable + SP défavorable
  3. Titre à la hausse faible : SY favorable + SP défavorable (ou vice-versa)
  4. Titre à la baisse faible : SY défavorable + SP favorable (ou vice-versa)

Les combinaisons sont plausibles ; mais il manque un élément important : quelle est l’incidence de chaque type de risque sur le risque globale du titre ? La réponse nous donnerait une mesure d’un type de risque par rapport à l’autre et ça permettrait de mieux nuancer les possibilités de profit sur un titre.

On répond à cette question avec un peu de calculs.

Voici les formules :

  1. Risque spécifique d’un titre = risque totale du titre – risque systématique
  2. Le risque total d’un titre = volatilité du titre au carré
  3. Risque systématique d’un titre = son béta au carré x la volatilité du marché au carré
  4. % du risque spécifique vs le risque total = Risque spécifique du titre / risque total du titre

1) Voici les données pour un premier exemple numérique (21 juillet 2015):

Volatilité de CNQ = 23,6 % ou 0,236 (Bourse de Montréal)
Beta de CNQ = 1,26 (Yahoo!)
Volatilité du marché = volatilité du XIU = 13,96 % = 0,14 (Bourse de Montréal)

Et voici les calculs :
Risque total du titre = 0,236 x 0,236 = 0,0557 (Formule 2)
Risque systématique de CNQ = (1,26 x 1,26) x (0,14 x 0,14) = 1,5876 x 0,0196 = 0,0311 (Formule 3)
Risque spécifique de CNQ = 0,0557 – 0,0311 = 0,0246 (Formule 1)
% du risque spécifique de CNQ par rapport au risque total de CNQ = 0,0246 / 0,0557 = 44 % (Formule 4)

2) Voici les données d’un deuxième exemple en date du 21 juillet 2015:
Volatilité de BCE = 15,78 % ou 0,1578 (Bourse de Montréal)
Beta de BCE = 0,56 (Yahoo!)
Volatilité du marché = volatilité du XIU = 13,96 % = 0,14 (Bourse de Montréal)

Et voici les calculs :
Risque total du titre = 0,1578 x 0,1578 = 0,0249 (Formule 2)
Risque systématique de BCE = (0,56 x 0,56) x (0,14 x 0,14) = 0,3136 x 0,0196 = 0,0061 (Formule 3)
Risque spécifique de BCE = 0,0249 – 0,0061 = 0,0188 (Formule 1)
% du risque spécifique de BCE par rapport au risque total de BCE = 0,0188 / 0,0249 = 76 % (Formule 4)

À la lumière des deux exemples précédents, on peut constater que l’influence des facteurs du risque spécifique par rapport au risque systématique est en fonction de la volatilité du titre et de son bêta.

3) Voici maintenant les données d’un exemple sur un titre fictif :
Volatilité de X = 15,78 % ou 0,1578
Beta de X = 1,00
Volatilité du marché = volatilité du XIU = 13,96 % = 0,14 (Bourse de Montréal)

Et voici les calculs :
Risque total du titre = 0,1578 x 0,1578 = 0,0249 (Formule 2)
Risque systématique de X (titre fictif) = (1,00 x 1,00) x (0,14 x 0,14) = 1,00 x 0,0196 = 0,0196 (Formule 3)
Risque spécifique de X = 0,0249 – 0,0196 = 0,0053 (Formule 1)
% du risque spécifique de X par rapport au risque total de X = 0,0053 / 0,0249 = 21 % (Formule 4).

En comparant le deuxième et le troisième exemple, on peut déduire qu’à parité de volatilité, plus grand est le bêta et plus le comportement du prix du titre dépend de facteurs du risque systématique et moins de facteurs du risque spécifique.

4) Dans un quatrième exemple, voici les données d’un exemple sur un autre titre fictif :
Volatilité de Y = 50 % ou 0,50
Beta de Y = 1,26
Volatilité du marché = volatilité du XIU = 13,96 % = 0,14 (Bourse de Montréal)

Et voici les calculs :
Risque total du titre Y = 0,50 x 0,0.50 = 0,2500 (Formule 2)
Risque systématique de Y (titre fictif) = (1,26 x 1,26) x (0,14 x 0,14) = 1,5876 x 0,0196 = 0,0311 (Formule 3)
Risque spécifique de Y = 0,2500 – 0,0311 = 0,2189 (Formule 1)
% du risque spécifique de Y par rapport au risque total de Y = 0,2189 / 0,2500 = 82 % (Formule 4)

Grâce aux premier et quatrième exemples, il est possible d’observer qu’à parité de bêta, plus la volatilité est grande et plus le comportement du prix du titre dépend des facteurs de son risque spécifique et moins des facteurs du risque systématique.