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Le pari risqué des fintechs

La forte hausse du prix des titres bancaires ces derniers mois dissimule une réalité préoccupante de l'industrie des services financiers, qui est en voie d'être très durement perturbée.

Bien que le secteur agisse encore en 2017 comme réserve de valeur, son rôle de « système nerveux central » de l'économie est de plus en plus remis en question par la croissance d'entreprises émergentes fortement axées sur le développement technologique : les fintechs.

Alors que la majorité des Canadiens encaissent encore leur chèque de paie, déposent leur épargne et financent leur vie à crédit via les institutions traditionnelles, partout sur ces segments, les fintechs offrent des solutions de rechange entièrement numérisées.

Évidemment, toutes les activités bancaires n'ont pas le même degré de vulnérabilité à cette disruption. Certaines activités spécifiques comme le paiement, le crédit individuel et la gestion privée figurent parmi les premières activités à voir croître une concurrence sérieuse provenant des fintechs. Qu'il s'agisse de PayPal ou de Square, ou encore de Lending Club, Borrowell ou WealthSimple, la promesse de valeur de ces entreprises est relativement similaire : gérer votre argent hors de la banque, de manière entièrement automatisée.

Bien entendu, si ces entreprises ont développé leur agilité et mettent de l'avant leur maîtrise de la technologie, tout n'est pas simple pour autant pour elles. L'une des compétences-clés des banques contemporaines est leur capacité à suivre et à répondre aux exigences des régulateurs, et à se conformer aux ratios qu'exigent les législateurs. Cette difficulté est particulièrement vive dans le cas d'entreprises multinationales et frappe donc les fintechs, qui avaient réussi jusqu'ici à échapper aux lois.

Or, si cet aspect est peu visible pour les clients des banques, toute la stabilité du système bancaire dépend précisément de ces éléments. Les investisseurs ont donc tendance à s'y intéresser particulièrement.

L'américaine Lending Club l'a appris à ses dépens en mai 2016, lorsque des révélations ont montré certaines irrégularités qui ont mené à la démissionATTENTION - Ce lien ouvrira dans un nouvel onglet. de son président, Renaud Laplanche. L'action de l'entreprise, qui s'échangeait à 25 $ peu après son entrée en Bourse, s'est effondrée de 34 % le même jour. Cotée en Bourse depuis 2015 et offerte à 15 $ lors de son premier appel public à l'épargne (PAPE), l'action s'échange aujourd'hui autour de 5 $.

D'autres joueurs comme Square sont beaucoup plus performants sur ce segment. Fondée et toujours dirigée par Jack Dorsey – celui-là même qui a fondé et dirige toujours Twitter –, l'entreprise dépasse systématiquement les attentes des investisseurs. Alors que le réseau social éprouve des difficultés, l'entreprise de paiements atteint quant à elle de nouveaux sommets. Plus de 16 milliards de dollars américains ont transité par cette application lors de son dernier exercice financier, une croissance de 32 % par rapport à l'année précédente.

Bref, là où le défi des banques consiste à atteindre plus de flexibilité et d'agilité dans leur transition technologique, le défi des fintechs se pose plutôt à l'inverse et consiste à bâtir des systèmes et des processus suffisamment robustes pour résister aux pressions tous azimuts des auditeurs, des législateurs et des régulateurs.

Quelque part entre ces deux objectifs, ce sont, de manière générale, les clients des banques qui gagnent. Pour les investisseurs, le résultat est moins certain. Mais c'est là tout l'intérêt de ces innovations : elles offrent un peu plus de risque, beaucoup plus d'innovation, et potentiellement, des marges plus intéressantes.