À la Bourse, la meilleure stratégie consiste souvent à ne rien faire!
Pour commencer cet article, je vous invite à imaginer le scénario suivant : vous êtes le gardien de but de l’Impact de Montréal, une équipe de soccer qui évolue dans la Major League Soccer (MLS).
Lors de la première partie de la finale de l’Association Est de la MLS, l’Impact affronte le Toronto FC devant plus de 60 000 personnes au Stade olympique. Le pointage étant égal, vous devez faire face à un coup de pied de réparation (penalty kick), une confrontation entre vous et un joueur de l’équipe adverse. Compte tenu de la grandeur du filet et du fait que le botteur est placé à 11 mètres avec un ballon voyageant à près de 130 kilomètres à l’heure, les chances qu’un but soit marqué sont de 75 %. Afin d’augmenter votre probabilité de succès, vous devez choisir rapidement l’une des trois options suivantes : plonger vers la gauche, demeurer au centre du filet ou vous jeter vers la droite. Quelle sera votre stratégie?
Selon Steven D. Levitt et Stephen J. Dubner, auteurs du livre Think Like a Freak, le gardien de but reste au centre seulement 2 % du temps, et ce, même si 17 % de tous les bottés sont dirigés vers cet endroit. Alors, pourquoi ne demeure-t-il pas au centre plus souvent?
Voici la réponse : il craint qu’on lui reproche un manque d’efforts. S’il reste au centre et que le tir se dirige vers la gauche ou la droite, il y a de fortes chances qu’il ressente de la honte devant ses coéquipiers, la foule et les milliers de téléspectateurs qui le regardent. Et bien que sa décision semble judicieuse en termes de probabilité, aux yeux de tous, cette tactique est perçue comme étant passive. Selon moi, la primauté de l’effort sur le résultat vaut aussi bien à la Bourse que dans le sport.
Le remord est le meilleur des stimulants pour ne rien faire.
Sans contredit, pour un négociateur actif, l’élection présidentielle américaine était un événement aussi décisif qu’un coup de pied de réparation au soccer. En fait, peu importe le résultat du scrutin, la communauté financière s’attendait à une plus forte volatilité des cours boursiers. Pour en profiter pleinement, à l’image d’un gardien de but au soccer, le négociateur actif se devait de réagir rapidement. Compte tenu du fait que nombre d’experts financiers anticipaient une sévère correction boursière advenant une victoire-surprise de Donald Trump, il était naturel de réduire son exposition en actions au lendemain du vote. En agissant ainsi, le négociateur actif espérait prendre la bonne décision et, en plus, il aurait l’impression d’avoir fourni un effort. Car la logique veut qu’il soit nécessaire d’être actif en période de fortes fluctuations boursières.
Malheureusement, il aurait été préférable qu’il conserve sa pondération investie en actions, car le S&P 500, le NASDAQ et le Dow Jones Industrial Average s’échangeaient à un nouveau sommet historique à la fin de novembre. Comme il était impossible de prédire le résultat de l’élection et, surtout, la réaction des participants de marché, l’approche passive, celle qui consiste à ne rien faire, était convenable. D’ailleurs, selon une analyse effectuée auprès de 66 000 comptes de courtage à commission réduite, un nombre élevé de transactions nuit considérablement au rendement. Entre 1991 et 1996, les meilleurs 20 % des investisseurs les plus actifs dont on a étudié le comportement ont généré un rendement annuel moyen de 11,4 %, comparativement à 18,5 % pour les 20 % d’investisseurs les moins actifs et à 17,9 % pour le S&P 500.
Au lieu de chercher à prédire la direction du marché lors d’événements majeurs comme le Brexit ou l’élection présidentielle américaine, le négociateur actif doit miser davantage sur les probabilités, ce qui implique un comportement plus passif. Pour ce faire, à l’image du gardien de but au soccer, il doit rester « centré » sur son objectif final pour prendre une décision optimale.